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Ortiz, assis dans le fond du tribunal, suivait les débats qui devaient conduire le juge Mclntyre à décider s’il devait ou non accepter la motion de vice de forme relative aux pièces à conviction déposée par l’avocat de Cyrus Johnson. La loi était claire, disait le juge ; si un policier voulait fouiller quelqu’un sans mandat, il devait avoir de bonnes raisons d’estimer que cette fouille permettrait de découvrir une pièce à conviction et ne pas avoir le temps d’aller demander un mandat de perquisition. Lorsque Cyrus Johnson avait été fouillé, l’inspecteur Ortiz aurait eu le temps de se procurer un mandat et n’avait pas de raison probante de croire que Johnson avait des stupéfiants sur lui. C’est à regret, conclut-il, qu’il se voyait contraint d’interdire au ministère public de présenter, dans un procès, une pièce à conviction dont la saisie avait été faite en violation de la Constitution des EtatsUnis.

L’avocat de Johnson sourit et serra la main de son client. TV ne lui rendit pas son sourire ; au lieu de cela, il regarda vers le fond du tribunal où Ortiz venait de se lever pour partir. Le policier savait dès le début quel serait le résultat de cette audience. Il avait étudié sa déposition pour qu’elle cadre avec les derniers attendus de la Cour suprême en la matière, c’est-à-dire de façon que l’on soit obligé de déclarer un non-lieu dans l’affaire Johnson. Il avait également contacté le procureur responsable de l’affaire et lui avait déclaré qu’il avait probablement agi trop hâtivement lorsqu’il avait fouillé Johnson. À la lumière du témoignage de TV au procès Stafford, Ortiz et le procureur avaient décidé de ne pas poursuivre le maquereau plus qu’il ne le fallait.

« Hé, Ortiz ! » lança une voix grave.

L’interpellé se tourna et vit Kermit Monrœ assis sur un banc, près de la porte.

« Je peux faire quelque chose pour toi, Kermit ?

— TV veut te voir. Il m’a demandé de m’arranger pour que t’ailles nulle part avant de lui avoir parlé.

— Dis-lui qu’on pourra se voir un autre jour. J’ai du boulot.

— Écoute, vieux, répondit Kermit, prenant tout son temps pour se lever, pourquoi vouloir toujours rendre les choses difficiles ? TV a dit que c’était important, et il te demande de l’attendre. Il a un tuyau pour toi. Pourquoi me casser les couilles alors qu’il veut te faire une fleur ? »

Ortiz était sur le point de répondre lorsque Johnson sortit à son tour du tribunal.

« Tu voulais me voir ? » demanda Ortiz.

TV sourit.

« Ouais, je veux te voir. » Il serra la main de son avocat et les deux hommes se séparèrent. « Allons dans ma voiture, au moins, il n’y a pas de micro planqué dedans », continua Johnson, toujours souriant.

Ortiz haussa les épaules. L’homme avait peut-être décidé de se lancer dans une carrière d’indic. Ce ne serait pas la première fois qu’un gros bonnet aurait eu la frousse après avoir senti passer le vent du boulet.

Ils prirent l’ascenseur jusqu’au rez-de-chaussée puis se rendirent à pied dans le parking, de l’autre côté du tribunal. La Cadillac de Johnson était garée au cinquième niveau, et Monrœ se glissa derrière le volant pendant que Johnson et Ortiz s’installaient à l’arrière sur les sièges de cuir.

« Bon, c’est quoi, ce truc si important ? voulut savoir Ortiz.

— Tu m’as baisé, Ortiz. Tu m’as planté la dope dans la poche et tu m’as obligé à moucharder pour que je n’aille pas en taule. Tu m’as obligé à témoigner dans l’affaire Stafford et à dépenser pas mal de fric en avocats. Sans compter que tu t’es parjuré et que tu as enfreint la loi. Pourquoi avoir fait toutes ces conneries ? Pour une seule et unique raison, évidemment : enfoncer ce pauvre chnoque de Stafford. Pour qu’il aille se geler le cul en cabane jusqu’à la fin de ses jours. C’est pas ça ?

— Continue, TV. Si tu as quelque chose à me dire, dis-le. Je n’ai pas tout mon temps.

— Oh ! ne crains rien, tu ne vas pas le perdre, Ortiz. Vois-tu, je voulais que tu saches un truc. J’ai menti. Ces conneries que j’ai racontées à la barre, c’était rien d’autre que ça – des conneries. »

Il s’arrêta pour laisser ce qu’il venait de dire produire son effet. Ortiz paraissait intrigué.

« Oh ! c’est vrai que Stafford a essayé de s’offrir une partie de jambes en l’air et qu’il a frappé Mordessa, mais ça ne s’est pas du tout passé comme je l’ai raconté. Il voulait de la chair noire, le petit Blanc, mais il n’a rien demandé de tordu. Lorsqu’ils se sont retrouvés dans la piaule, cette grande conne de Mordessa a essayé de lui chouraver son portefeuille. Il l’a surprise et elle a commencé à gueuler contre lui.

« C’est une parfaite salope, la Mordessa, et elle cogne dur. Stafford a été obligé de lui flanquer un gnon rien que pour se débarrasser de ses griffes.

— Mais alors, l’histoire que tu as racontée à la police ?

— Hé, j’avais pas tellement le temps de réfléchir avec les poulagas qui rappliquaient. J’ai décidé de leur dire que le miché avait fait quelque chose de très gênant pour lui, comme ça il ne déposerait pas plainte. J’ai dit le premier truc dingue qui m’est passé dans la tête. Mais ton Stafford, c’est pas un sado-machin-truc j’sais pas quoi. Il n’aurait rien fait, bordel, si Mordessa ne lui avait pas tapé dessus.

« Alors tu vois, mon vieux, le témoignage que tu m’as arraché par des moyens illégaux et forcé à donner n’est qu’un tissu de mensonges. Et tu sais très bien que, sans ce témoignage, le jury aurait acquitté Stafford. Sauf que tu ne peux dire à personne que j’ai menti sans te filer toi-même dans les emmerdes, n’est-ce pas ? Ce qui veut dire qu’il va falloir que tu passes le reste de ta vie avec ce que tu as fait, pendant que Stafford passera le reste de la sienne en cabane. »

Ortiz s’enfonça dans le siège, s’efforçant de réfléchir. Quelle importance que Johnson ait menti ? Stafford lui aussi avait menti. Il avait déclaré sous serment n’avoir jamais été avec une prostituée. Et le policier savait bien qui il avait vu dans l’encadrement de la porte, au motel, le soir du crime. Larry Stafford avait tué Darlene Hersch.

« Je vais te dire un truc, Ortiz. Vous autres, les Blancs, vous êtes vraiment cinglés. C’est ce que j’ai fini par découvrir en faisant ce boulot. Toi qui me plantes la dope, Stafford qui a besoin de s’acheter une chatte, et cet écrivain… »

Johnson secoua la tête et Ortiz se tourna vers lui.

« Quel écrivain ?

— Celui qui a battu Mordessa et qui voulait lui faire tous ces trucs bizarres. Bordel, dire qu’il a failli être condamné pour meurtre… Mordessa a eu de la chance de ne pas y passer.

— Mais de quoi parles-tu ?

— Mordessa a vu sa photo dans les journaux, à la fin du procès. Sur le coup, elle l’a pas reconnu, parce qu’il portait une perruque quand il lui a flanqué sa raclée. C’est de là que vient mon histoire. Fallait la voir. Le type lui avait dit qu’il voulait l’attacher ; elle, elle voulait pas. Alors, il s’est mis à la tabasser à coups de pied et de poing jusqu’à ce qu’elle pleure. Et je peux te dire qu’il faut pas y aller de main morte pour faire chialer cette fille. Il lui a vraiment fait mal. Après quoi, il a tué sa femme.

— Mais de qui parles-tu ? demanda lentement Ortiz.

— Son nom ne me revient pas. Sa femme était riche, en tout cas, et elle a été battue à mort dans cette grande maison, au bord du lac.

— Thomas Gault ?

— Tout juste. »

Ortiz regarda fixement le maquereau.

« Tu veux dire que cette histoire que tu as racontée à la barre des témoins est bien arrivée, mais que c’est en réalité Thomas Gault qui a battu ta pute ?

— Exactement.

— Et quel genre de perruque portait-il ?

— Aucune idée. »

Ortiz ouvrit la portière et descendit du véhicule. Il avait l’impression de se noyer.

« Où tu vas, Ortiz ? demanda TV avec un petit rire. Te confesser à l’église ou bien raconter au juge que le petit Stafford qui est en prison n’est pas coupable ? Sauf que tu peux pas, vu que tu serais obligé de raconter aussi les conneries que tu as faites. »

Le policier s’éloigna. Le moteur démarra, et Monrœ le frôla d’aussi près que possible, faisant crier les pneus en s’engageant dans la rampe. Ortiz n’y fit même pas attention.

Le mensonge de Johnson ne signifiait pas nécessairement que Stafford était innocent. Mais la perruque… Gault et Stafford étaient de stature semblable. Avec une perruque blonde…

Puis Ortiz se souvint du mystérieux inconnu qui, d’après la déposition faite sous serment par Gault, aurait assassiné sa femme ; il l’avait décrit comme étant d’allure athlétique, de taille moyenne, avec des cheveux blonds frisés. Une description qui aurait convenu à Gault lui-même, mis à part les cheveux blonds frisés. Et à Stafford.

Ortiz se rappela alors autre chose. Grimes, le portier de nuit du Raleigh Motel, avait déclaré dans sa déposition que l’homme qu’il avait vu s’éloigner en voiture du motel avait des cheveux bruns, assez longs. Gault avait effectivement des cheveux bruns, et il les avait longs lors de son procès. S’il avait enlevé une perruque après avoir tué Darlene, cela expliquait que lui ait vu un blond frisé et Grimes un brun à cheveux longs.

Avait-il pu se tromper ? Il semblait impossible que deux hommes aient la même stature, la même chemise, le même pantalon, la même voiture. Cependant, Gault et Stafford avaient la même corpulence ; quant au pantalon, c’était un modèle archicourant.

La chemise ? Si le modèle n’était pas aussi courant que le pantalon, il s’en était vendu tout de même plus d’une à Portland. Et la voiture ? Voilà qui était simple à vérifier. Trop simple. Le policier sentit son estomac se nouer. Il avait peur. Peur d’avoir commis une terrible erreur. Si jamais Thomas Gault possédait une Mercedes beige, Larry Stafford, dans ce cas, pouvait très bien être innocent.

*

Gregory finissait de dicter une lettre lorsque David entra.

« Tu t’occupes toujours du comité d’éthique et de déontologie du barreau, n’est-ce pas ? demanda David, se laissant tomber dans un fauteuil.

— Oui, pourquoi ? Aurais-tu récemment commis une entorse à la déontologie ? répliqua Gregory, ne plaisantant qu’à moitié.

— Permets-moi de te soumettre une hypothèse, et dis-moi ce que tu en penses. »

Gregory coupa le dictaphone et s’installa confortablement sur son siège. Il se concentra, les yeux plissés, la tête légèrement inclinée de côté.

« Supposons qu’un avocat représente A, auteur d’une attaque de banque à main armée, et que A soit condamné. Plus tard, B engage ce même avocat pour le représenter dans une affaire n’ayant rien à voir. Or B raconte à l’avocat, sous le sceau de la confidentialité, que c’est lui qui a commis l’attaque de banque pour laquelle A a été condamné, ainsi que d’autres forfaits. Quand l’avocat suggère à B d’aller avouer son crime de façon à innocenter A, B refuse. Que peut faire l’avocat pour aider ? »

Gregory réfléchit un moment, puis prit un livre sur la crédence située derrière son bureau. Il le feuilleta jusqu’à ce qu’il ait trouvé ce qu’il cherchait, et lut quelques instants en silence. David attendait calmement, regardant le pied des collines, par la fenêtre. Une onde douloureuse lui crispa l’estomac et il se mit à se masser doucement au-dessus de la ceinture.

« Je dirais que ton avocat a un sacré problème, admit Banks. D’après Wigmore on Evidence et les Règles d’éthique, on ne peut révéler les informations confidentielles données par un client que si celui-ci poursuit son avocat, lequel est alors en droit de faire part de ce qui lui a été dit, dans la mesure où ces informations permettent de contribuer à sa défense. Si le client confie à son avocat, par ailleurs, qu’il envisage de commettre un crime, l’avocat a le devoir de faire les révélations indispensables pour empêcher sa réalisation ou assurer la protection de la personne menacée. Sinon, dans le cas où ces informations ont été transmises confidentiellement et alors que le client demandait un conseil juridique, la confidentialité est permanente. J’ai bien peur que, dans ton hypothèse, l’avocat ne puisse rien faire pour protéger A. »

David réfléchit calmement. Gregory venait de lui confirmer ce qu’il soupçonnait depuis le début.

« Et si jamais l’avocat décidait de passer outre les Règles d’éthique et de ne pas respecter la confidentialité ?

— On pourrait l’empêcher d’en faire état devant un tribunal, et on ne pourrait obliger son client à venir corroborer les faits. Tu aurais beaucoup de mal à faire sortir A de prison dans de telles circonstances. »

Dans l’estomac de David, la douleur s’accrut encore. Il respira profondément, espérant que Gregory ne remarquerait pas qu’il n’allait pas bien.

« N’y a-t-il rien que je puisse faire pour t’aider ? » Il avait désespérément besoin de cette aide qui lui était proposée, mais ne pouvait la demander à son ami. Comment lui révéler ce qu’il avait fait sans perdre le respect que Gregory avait pour lui ?

« Non, Greg. C’était juste un cas d’école. »

Gregory aurait bien aimé approfondir la question, mais préféra demander à David s’il voulait déjeuner avec lui.

« Non, désolé, Greg, mais j’aime autant rentrer à la maison. Je ne me sens pas très bien.

— Es-tu bien sûr que je ne peux rien faire pour toi, Dave ? Si quelque chose te tracasse… »

David secoua la tête et sourit sans conviction.

« Pas de problème. Rien que des brûlures d’estomac. » Il se leva. « À demain matin.

— Ouais, à demain », répondit Banks, qui fronça les sourcils et resta plusieurs minutes immobile, songeur, après le départ de David.

*

« Pourquoi vous intéressez-vous tant à Thomas Gault ? demanda Norman Capers.

— J’aimerais autant ne pas le dire, Norm », répondit Ortiz.

Capers haussa les épaules.

« Au fond, qu’est-ce que j’en ai à faire ? Si ça peut vous aider à mettre ce salopard à l’ombre, je me passerai très bien de ne pas le savoir. »

Cette réaction surprit Ortiz. Norman Capers était un substitut expérimenté, professionnel, qui appartenait au bureau du procureur général depuis longtemps. Il se laissait rarement aller à ce genre de manifestation quand il parlait d’une affaire.

« C’est son style littéraire que vous n’aimez pas ? lui demanda le policier d’un ton léger, espérant le pousser ainsi à en dire davantage.

— Je ne peux pas blairer cet enfoiré, point final. J’ai poursuivi des tas de gens, mais lui… je ne sais pas comment exprimer cela. Julie Gault… le type qui a fait le coup y a vraiment pris plaisir. » Le procureur se tut un instant et examina ses ongles. « Voyez-vous, il n’a pas arrêté de lancer des blagues pendant tout son procès, reprit-il. Il traitait toute l’affaire comme s’il s’agissait d’une comédie montée pour l’amuser. Oh ! pas quand le jury était dans la salle. Dès qu’ils s’asseyaient dans leur box, il se tenait bien droit et affichait une mine lugubre. Quant à sa déposition… il a craqué et fondu en larmes.

« Sauf que tout était du cinéma. Dès que le jury fut sorti pour délibérer, il s’est tourné vers moi et m’a adressé un clin d’œil. Malheureusement, il avait été sensationnel, à la barre, et ces braves gens n’ont pas vu le reste.

— Vous le croyez capable de tuer quelqu’un ?

— Gault ? C’est un champion en matière de combat à mains nues et rapproché. Vous ne connaissez donc pas son passé ? »

Ortiz secoua négativement la tête.

« Je ne me suis pas occupé de l’affaire en tant que policier, et je ne l’ai pas spécialement suivie. J’en ai eu les échos habituels au commissariat et j’ai lu les articles dans les journaux, c’est tout.

— Notre Tom est un tueur, un vrai. Mercenaire en Afrique pendant plusieurs années. Il y a pété quelques plombs, à mon avis, des plombs importants. Quand il habitait Hollywood, il a été mêlé à plusieurs sales affaires de bagarres et j’ai entendu dire que cela lui était arrivé ici aussi.

— C’est un dragueur ?

— Lui ? Il saute sur tout ce qui bouge et porte jupons. Mais c’est le genre amour vache. Nous avons pu parler à deux de ses ex pendant l’enquête préliminaire. Il les avait battues plus d’une fois. Très méchamment et le sourire aux lèvres, comme s’il y prenait un réel plaisir. Ce type est sérieusement barjot et très fort. »

Et, se dit Ortiz, le service des immatriculations lui connaît une Mercedes beige.

Le Dernier Homme Innocent
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